Argh !!!!
Attention, voici que déboule le Goon ! Ce savoureux comic de l’américain Eric
Powell est publié aux États-Unis par Dark
Horse et en France aux éditions Delcourt.
Cintrée, frappée, allumée, cette série bastonne grave, pour le plus grand
plaisir (un peu régressif il est vrai) du bédéphile. Ça va saigner !
© 2005 Guy Delcourt Productions
Eh oui,
ami lecteur, j’ai craqué. Cela faisait un moment que cette BD aux couvertures chamarrées
m’aguichait du coin de l’œil, telle une fille de petite vertu court vêtue et
outrageusement fardée, sublimement vulgaire et vulgairement sublime. Longtemps
j’ai feuilleté ses pages sans oser l’aborder plus intimement et aller jusqu’à
lire un album. Voilà c’est fait ! J’ai sauté le pas. Et laisse-moi te
dire, estimé lecteur, que, même si j’ai voué mon âme aux flammes de la damnation
éternelle, je ne regrette rien, non, rien de rien. Ce comic farfelu et délirant réussit l’union contre nature entre l’univers
du film (ou du roman) de gangsters et la série Z horrifique, le tout agrémenté d’une
bonne dose d’humour noir. Attention, que les choses soient bien claires :
esprits cartésiens et amateurs de subtilité s’abstenir ! Ici commence
l’empire du Grand N’importe Quoi !
© 2006 Guy Delcourt Productions
Le Goon
est un malabar balafré, une armoire à glace qui règne sur un quartier de la
ville. Aux esprits curieux, j’indique à toutes fins utiles que, dans la langue
de Shakespeare et de Britney Spears, le terme « goon » s’applique à la fois à un costaud lié à la pègre et à un
abruti. On me signale aussi dans l’oreillette qu’en hockey sur glace, le terme
désigne également le joueur brutasse et vicieux qui cogne salement l’adversaire
pour l’emporter. Les spécialistes apprécieront… Revenons à notre Goon. Abandonné
par sa mère, élevé par sa tante Kizzie « la Vierge de fer »,
catcheuse dans un cirque ambulant, notre héros est ce que l’on appelle un dur à
cuire. Pour le compte de Labrazio, mystérieux chef du gang le plus puissant de
la ville, le Goon se charge de faire passer à la caisse les mauvais payeurs, de
corriger ceux qui tentent de tricher aux parties de cartes truquées, d’éliminer
les gêneurs attirés par les lumières de la ville et, éventuellement, de
protéger la veuve et l’orphelin sur le territoire de son Boss. C’est bien
connu, les truands n’aiment pas les trouble-fêtes qui gênent le business !
Seulement voilà, il y a fort à faire depuis que, dans Lonely Street, un
mystérieux prêtre zombie, arborant un visage découpé cloué sur son chapeau
haut-de-forme, a constitué un gang rival dont les « soldats » sont
des zombies. Bienvenue dans cet univers pour le moins... euh, baroque, chaînon
manquant entre Sur les quais et le slasher hollywoodien, où les lutins du
Père-Noël sont cannibales, où les loups-garous mangent des fondants aux
cacahouètes et où pleuvent extraterrestres visqueux ou mécanoïdes
d’outre-espace. Aidé de son acolyte Franky, un nabot légèrement psychopathe aux yeux en boutons de bottines, le
Goon, armé de son calibre 38, cogne et défouraille à tout va pour faire régner
sa loi. Qu’on se le dise : ce n’est pas un demi-sel !
© 2006 Guy Delcourt Productions
Le
style parodique d’Eric Powell est très
agréable. Ultra-dynamique, son dessin fait la part belle aux bagarres
éclatant dans les planches. Personnellement, j’y vois comme une influence de Will Eisner (1917-2005), le génial créateur
du Spirit, ce qui est plutôt une
bonne carte de visite. Tout en exagérations, ses personnages sont des
caricatures assez réjouissantes : la Boule par exemple est un truand
fluet, qui tient au bout d’un bras hypertrophié une boule de bowling avec
laquelle il cogne ses adversaires. Pete le barbeau est un colosse à tête de
poisson, muni d’un crochet à la place de la main droite et d’une jambe de bois.
Etc. etc., la galerie des freaks est
longue.
© 2007 Guy Delcourt Productions
Très
honnêtement, ami lecteur, je ne sais si cette série tient la route sur la
longueur. Mais lire un tome du Goon
constitue un des plaisirs simples et réjouissants de l’existence. Tu en
conviendras, ils ne sont pas légion en ce bas monde. Alors attache un
zombie sur le capot de ta Packard, enflamme-le et fonce à travers la ville pour
rejoindre le Goon !
Longue
vie au Triangle !
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