Avec Iron Fist, super-héroïque maître des
arts martiaux, savourons, ami lecteur, un concentré de groovytude et de pop
culture au parfum capiteux d’encens extrême-oriental multivitaminé par la trépidante
et dynamique Amérique des Seventies. Encore une merveille de la Marvel !
© Marvel, 1974
Début
des années 1970, la mode est aux films d’arts martiaux. Fasciné, l’Occident
découvre le jeet kune do du « Petit Dragon » Bruce Lee et suit les pérégrinations dans l’Ouest de David Carradine dans la série Kung Fu. Collant à l’air du temps, le
scénariste Roy Thomas et le
dessinateur Gil Kane (1926-2000)
créent en mai 1974 le personnage d’Iron Fist pour l’éditeur Marvel. Mais rapidement après ce coup
d’éclat, aussi parfaitement exécuté qu’un poing du tigre asséné en pleine face du
diabolique Fu Manchu, les deux créateurs passent la main à d’autres artistes.
Si le scénario reste cohérent, force est de constater que les dessinateurs ne
sont pas toujours à la hauteur.
© Marvel, 1976
La
divine surprise vient alors d’Albion, avec l’arrivée sur la série de deux
Britanniques, le scénariste Chris
Claremont puis le dessinateur John
Byrne en octobre 1975. Pendant plus de 15 numéros les deux compères se
livrent à un ballet étourdissant d’aventures super-héroïques à la sauce aigre
douce, exaltées par le dessin fluide, fin et précis de Byrne. Voilà de quoi enchanter le bédéphile et lui faire atteindre
le Nirvana…
© Marvel, 1976
Âgé de
9 ans, le jeune Daniel Rand suit son père et sa mère dans une expédition au
cœur de l’Himalaya à la recherche de la mythique cité de K’un-Lun. Victimes
d’un accident de montagne, Daniel assiste au meurtre de son père, assassiné par
son cupide associé, puis à la mort de sa mère. Mais il est miraculeusement sauvé
par les habitants de K’un-Lun, cité céleste cachée dans un plan mystique, qui
n’apparaît qu’une fois tous les dix ans. Recueilli par le maître de K’un-Lun :
Yü-Ti l’Auguste Personnage de Jade, Daniel Rand entame un sévère entraînement aux arts
martiaux sous la férule de Lei Kung le Tonnerre. Dix ans plus tard,
au terme de son apprentissage, il affronte le seigneur dragon Shou Lao l’immortel
et, victorieux, plonge le poing dans son cœur en fusion. Il devient alors Iron
Fist, l’arme vivante, doté du pouvoir de Shou Lao l’immortel. Revenu à New
York, Daniel Rand cherche à venger ses parents avant de mettre son puissant
pouvoir au service de la justice et du bien.
© Marvel, 1976
Sur
cette trame de vengeance somme toute très classique, les auteurs opèrent un
improbable syncrétisme entre geste super-héroïque, arts martiaux et influences
asiatiques. Dans l’écurie Marvel, le
personnage d’Iron Fist est singulièrement remarquable. Masqué de jaune impérial, le
torse marqué du dragon ailé Shou Lao, félin et agile, il utilise la puissance
de son poing d’acier pour d’aériennes prises de kung fu qui contrastent avec
les chocs frontaux des brutasses de service. Mais la série est aussi fascinante
par ses mélanges détonants. Quand Shaolin rencontre Big Apple… Outre les
habituels super-vilains destructeurs et autres ravageurs à la petite semaine, Iron
Fist affronte ainsi toute une série de personnages hauts en couleur, vaguement
orientalisants, qui ravissent littéralement votre serviteur : des
adorateurs de Kali, le diabolique Maître Khan et ses sbires, le gang asiatique
des Golden Tigers et j’en passe. C’est coloré, c’est incongru, c’est (un peu)
n’importe quoi, mais c’est fichtrement réjouissant. C’est le chaînon manquant
entre Yip Man et Cassius Clay ! Et puis notre
sympathique héros est secondé par la ravissante Misty Knight, ex flic de choc, experte
en arts martiaux, à la coupe afro impressionnante et au bras bionique, formant
ainsi (à ma connaissance) un des premiers couples mixtes de l’histoire du 9e
art.
© Marvel, 1976
En
France Iron Fist connaît une parution un peu erratique, d’abord dans la
cultissime revue Strange, puis dans Titans, aux éditions Lug. Tu l’auras deviné, fidèle lecteur,
ce personnage exerçait sur moi une fascination un peu irrationnelle. Minot, je lisais
et relisais frénétiquement les quelques numéros que je possédais, renfermant
les précieuses aventures de l’un de mes personnages Marvel préférés.
© Éditions Lug
Alors
ami lecteur, sors ton nunchaku, et entre dans l’arène sous le regard des quatre
rois dragons. La « voie du poing qui intercepte » est difficile mais
ô combien enrichissante.
Longue
vie au Triangle !
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