Avec Batman, the Cult, Bernie Wrightson, le maître du gothique américain, nous présente
une version bien à lui du chevalier noir et de ses légendaires fêlures. Entre
effondrement psychologique et furie furieuse, pas de répit pour notre héros.
© DC Comics
Paru
entre août et novembre 1988, Batman, the
Cult est une mini-série autonome de quatre numéros, publiée par DC Comics qui réunit pour l’occasion le
scénariste cosmique Jim Starlin et
le génial Bernie Wrightson, prince
du macabre dessiné et grand-maître de l’horreur en vignettes (lire ici la chronique des histoires de Wrightson dans Eerie et Creepy). La série est traduite en
français par Comics USA en 1989 sous
le titre mollasson d’Enfer blanc.
© DC Comics
En la
tumultueuse ville de Gotham City, protégée par un vengeur masqué et capé que
nous ne présenterons plus, un singulier homme d’église, le diacre Blackfire,
ouvre un refuge pour les exclus dans le quartier le plus glauque de la ville.
Parallèlement, notre croisé du crime enquête sur les meurtres sanglants de
criminels qui battent ordinairement le pavé de la grande métropole. Batman
découvre peu à peu que Blackfire fomente, depuis les bas-fonds de la ville, un Grand Soir des exclus de tous bords, âmes perdues avides de vengeance, prêts à
suivre le premier leader charismatique venu. Surpris, Batman est capturé par
l’étrange secte qui se terre dans les égouts de Gotham. Notre héros
s’inclinera-t-il devant son gourou ? Et qui est vraiment le diacre
Blackfire ? Un être surnaturel ? Un David Koresh apôtre de l’équarrissage
pour tous ? Un Jim Jones thuriféraire du suicide collectif ? Un Raël
de supermarché ?
© DC Comics
Enchaîné,
drogué, torturé, brisé, mais bientôt en proie à une furie vengeresse qu’il a du
mal à contrôler, le Batman de Wrightson
et Starlin est assez fascinant dans
le genre borderline. Évidemment, se
confronter à un pseudo Charles Manson et à sa « famille » de dingues prêt à rejouer
le massacre de Cielo Drive à l’échelle d’une ville peut laisser quelques
traces…
© DC Comics
Graphiquement
parlant, le Batman de Wrightson est
tout simplement époustouflant. L’artiste dessine sa silhouette effilée et
longiligne dans des cases qui ne sont pas sans rappeler les plans du cinéma
expressionniste. Travaillant sur le masque noir du héros, il en allonge
démesurément les oreilles de chauve-souris pour en donner une version
typiquement wrightsonienne, plus inquiétante que familière. Quant à la
colorisation des planches, crue et presque criarde, elle présente un indéniable
charme désuet. Soooo 80 !
© DC Comics
Incontestablement, the Cult participe à la relecture du
personnage de Batman entamée au cours des années 1980 sous la houlette débonnaire de pointures telles que Frank Miller ou Dave McKean (lire ici la chronique de Batman, Arkham Asylum) pour en faire un
personnage toujours plus sombre et torturé. Alors, fidèle lecteur, tu sais ce
qu’il te reste à faire : enferme-toi dans ta cave avec ton fusil à pompe
et cette pile de vieux comics en
attendant l’Apocalypse.
Longue
vie au Triangle !