Avec Tyler Cross, paru en août 2013 chez Dargaud, le dessinateur Brüno et le scénariste Fabien Nury plongent au cœur du Texas
des années 1950 pour un thriller hard
boiled d’une efficacité redoutable.
© Dargaud 2013
Que les
choses soient claires : Tyler Cross n’est pas un bandit au grand cœur. Non
vraiment pas. Tyler Cross est un salaud, sans foi ni loi, à la gâchette facile,
et pas vraiment porté sur le sentimentalisme. Un gars capable de glisser froidement
des cartouches de chevrotine dans la bouche de sa dulcinée tout juste abattue,
avant de l’arroser d’essence puis d’incendier son corps pour qu’on ne puisse
l’identifier. Bref, pas vraiment le genre de paroissien qu’il convient de
présenter à grand-maman pour le déjeuner dominical.
Couverture de l'édition spéciale, en noir et blanc
© Dargaud 2013
Or
donc, notre (anti)héros est chargé par un ponte de la mafia de mettre la main
sur une cargaison d’héroïne mexicaine. Évidemment, l’interception tourne au
carnage et Tyler Cross se retrouve seul en plein désert avec un sac de 17 kilos
d’héroïne et 20 dollars en poche. Ce qui, quand on y songe, n’est guère
beaucoup lorsque l’on doit échapper à la fois aux flics et aux trafiquants que
l’on vient de repasser, tout en écoulant discrètement 17 kilos de blanche
mexicaine premier choix. Se faisant passer pour un représentant de commerce,
notre homme gagne la ville la plus proche, Black Rock. Mais cette délicieuse
bourgade au charme rugueux est en fait la propriété quasi exclusive de la
famille Pragg. Dans cette ville isolée, qui ne doit guère compter plus de 1275
âmes, Spencer Pragg, le tyrannique patriarche, règne d’une poigne de fer. Pour
Tyler Cross, les ennuis ne font que commencer…
Scénariste
renommé, Fabien Nury livre une
histoire percutante, à la noirceur revendiquée, convoquant tour à tour des
personnages emblématiques du roman ou du film noir que n’auraient pas reniés Dashiell Hammett ou Jim Thompson : tueurs impassibles,
beautés fatales, avocats pourris, Federales
corrompus, flics bouseux et shérif psychopathe… Que du beau monde !
Le tout
est magnifiquement mis en image par le talentueux Brüno dont j’apprécie particulièrement le travail (lire lachronique de Lorna ; lire lachronique de Inner City Blues). Clair
et stylisé, son dessin éclate dans des cases très cinématographiques. Tels des
plans en Cinémascope, certaines cases s’étalent sur toute la largeur de la
page. Ça c’est du grand spectacle !
En
route pour une équipée sauvage au Texas. Une chose est sure, on se tue beaucoup
dans le Lone Star State.
Longue
vie au Triangle !